Et vous, quel est votre avis sur le tarif « prosumer » ?
02/06/2020
On l’avait appelé redevance photovoltaïque avant de l’appeler tarif prosumer (prosumer provenant de la contraction des termes anglais « producer » et « consumer » c’est-à-dire un consommateur qui produit aussi de l’électricité, dans la majorité des cas à partir de panneaux photovoltaïques).
En 2017, la CWaPE l’avait reporté à 2020 (revoir nos news des 9 juin 2017 et 19 juillet 2017) puis le Gouvernement l’a repoussé à deux reprises face aux pressions exercées par les détenteurs de panneaux qui s’étaient déjà vus raboter les certificats verts de 15 ans à 10 ans.
Pourtant, ce tarif entrera bien en vigueur. Et probablement cet automne. Ca semble en effet inévitable pour maintenir les équilibres économiques de la distribution d’électricité mis en périls par la part croissante de producers (ndlr : une alternative pourrait être de financer les réseaux par une voie régalienne, c’est-à-dire par l’impôt plutôt que par un tarif de distribution, ce qui est cependant peu probable vu que c’est actuellement l’inverse avec de nombreuses politiques financées par la facture électrique).
Il est fort à parier que tôt ou tard, la compensation même de l’énergie (des électrons) posera problème. En effet, les fournisseurs ne vont pas pouvoir se permettre financièrement de contrebalancer sans limite l’énergie injectée par les petits producteurs photovoltaïques en mi-journée en été (dont la valeur chute avec le développement du photovoltaïque) par de l’énergie hivernale de flexibilité qui pourrait nécessiter la mise en route de coûteuses centrales au gaz.
Un changement de paradigme est en route. Plutôt que de mener un combat vain, il semble préférable d’embrasser cette évolution. C’est-à-dire se plonger dans les communautés d’énergie renouvelable bientôt autorisées en Wallonie pour y trouver la place adéquate pour les petits producteurs photovoltaïques, combinant leur intérêt et l’intérêt collectif. Bientôt ils pourront vendre leur excédent d’énergie à leur voisin et c’est là sans doute la seule sortie par le haut possible pour ces épineuses questions tarifaires.
Mais revenons au tarif prosumer.
Ce tarif frappera donc les petits producteurs photovoltaïques pour l’énergie transitée sur le réseau (injectée lors des excès de production et en prélevée plus tard). Il sera calculé sur base forfaitaire théorique compte tenu de la puissance de l’installation (on parle de tarif capacitaire car lié à la capacité de l’installation) ou sur base réelle (en mesurant sur base quart-horaire l’énergie prélevée du réseau à l’aide d’un compteur électronique, communicant ou non). Une estimation du montant que vous devrez payer peut être calculée à partir d’un simulateur mis à disposition par la CWaPE (revoir notre news du 1er juillet 2019).
Certains multiplient les conseils pour tenter de réduire ce tarif en déplaçant vos consommations au moment où les panneaux produisent.
Pourtant la plupart des exemples semblent difficilement praticables et souvent sans intérêt financier réel. La seule solution qui présente un intérêt financier dans tous les cas de figure et dans toutes les configuration est de réduire sa consommation.
Voilà notre avis sur les quelques exemples repris dernièrement dans les médias.
Le pilotage du chauffe-eau électrique est possible et donne de bons résultats. Il s’agit d’ailleurs selon nous du seul élément vraiment pertinent actuellement, pour autant que le surcoût ne soit pas trop élevé (un calcul de rentabilité basé sur une estimation de la seule énergie déplacée est nécessaire : le déplacement de la charge n’a pas de sens en hiver et seule une partie de l’énergie nécessaire au chauffage de l’eau sur l’année peut être déplacée). Le fabricant d'onduleur SMA par exemple propose des solutions que nous avons pu tester et qui donnent de bons résultats. Attention cependant aux réglages initiaux pour éviter la douche froide au sens propre du terme.
Notons également que le chauffe-eau électrique, même alimenté par du solaire en été, demandera de l’électricité carbonée ou nucléaire en hiver avec un bénéfice sociétal à évaluer.
Le déplacement des électroménagers est possible avec certaines prises pilotables, par exemple la technologie Smappee, pour autant que vos électroménagers le permettent.
Ca fonctionne pour le lave-vaisselle. Moins pour la machine à lessiver et le sèche-linge – sauf si vous êtes à la maison en journée – puisque le séchage du linge doit suivre son lavage… et qu’il faut quelqu’un pour charger ou décharger le linge sec ou à sécher.
La majeure partie de l’énergie utilisée par la machine et le lave-vaisselle consistant au chauffage de l’eau, une alternative serait de déplacer uniquement le chauffage de l’eau, par exemple en alimentant les appareils directement en eau chaude (et déplacer la consommation du chauffe-eau comme évoqué ci-dessus). Ca nous semble une approche pragmatique et qui, d’après les retours que nous avons eus de certains d’entre vous, fonctionne bien (à condition de placer un mitigeur et de choisir correctement la température d’alimentation de la machine).
Le déplacement des consommations du réfrigérateur ou du surgélateur nous semble peu praticable et peu pertinent parce que ce déplacement ne peut avoir un amplitude que de quelques dizaines de minutes pour le réfrigérateur et 3 ou 4 heures au maximum pour le surgélateur (voir les conclusions des travaux du groupe REDI de la CWaPE sur le sujet en 2011).
Il reste le stockage dans des batteries stationnaires ou mobiles, ce second cas étant celui des véhicules électriques. Dans les deux cas, l’investissement est tel qu’il ne peut être motivé par le seul tarif prosumer.